Du « Concours qualité » à un Management intégré de la qualité
Feedback sur leur performance à l’équipe d’un centre de santé © GIZ / Rukemampunzi Landry
Une boîte à outils du Burundi montre comment instaurer une culture de la qualité dans les services de santé
Pour la première fois, une boîte à outils présente l’approche « Concours qualité », initiée par la GIZ en Guinée dans les années 2000 et largement reprise ailleurs. Effets démontrés à l’appui, l’équipe du Burundi montre comment faire de cette compétition positive une porte d’entrée à un management durable de la qualité des services.
C’est également au Burundi que la mise en œuvre de l’approche a bénéficié pour la première fois d’un accompagnement scientifique rigoureux et continu permettant d’en mesurer les effets. De 2013 à 2022, le projet « Renforcement des structures de santé dans le domaine de la planification familiale et de la santé et des droits sexuels et reproductifs (SDSR) au Burundi », mis en œuvre par la Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit GmbH (GIZ) sur mandat du Ministère fédéral allemand de la Coopération économique et du Développement (BMZ), a organisé trois éditions du Concours qualité auxquelles ont participé 90 centres de santé dans 6 districts sanitaires. L’approche s’est progressivement raffinée pour donner la dernière mouture des outils que voici.
Cette boîte à outils a pour objectif de capitaliser et pérenniser l’expérience du projet en documentant cette approche originale de Management de la qualité (MQ). Elle vise ainsi à la rendre accessible et praticable pour toute personne, au Burundi ou ailleurs, qui tient à cœur la qualité des services offerts dans leur système de santé – qu’elle soit planificatrice, gestionnaire, prestataire de soins ou simplement curieuse. La boîte à outils consiste en des chapitres explicatifs avec des outils techniques en annexe. Pour visionner ou télécharger la boîte à outils Approche intégrée de Management de la qualité (« Concours qualité ») cliquez sur l’image.
La théorie du changement qui sous-tend l’approche décrit les actions de mise en capacité visant l’autonomie des acteurs, aussi bien les Equipes cadres de district que les équipes des formations sanitaires. Cette mise en capacité s’appuie sur la mise à disposition d’outils mais aussi le développement de compétences en Management de la qualité. L’instauration d’une culture de la qualité s’observe aux deux niveaux.
Pour découvrir l’approche de façon amusante, téléchargez ce quizz en cliquant sur l’image.
L’approche intégrée de Management de la Qualité dénommée « Concours qualité » est basée sur six « piliers » qui se renforcent mutuellement.
Pilier 1 : La compétition positive
Le Concours qualité utilise une stratégie de « gamification » – une compétition positive entre structures de même niveau (par exemple, les centres de santé d’un même district sanitaire) couronnée par le décernement de prix. Le concours se focalise sur un nombre restreint de thématiques plutôt que sur l’ensemble des services. Il est basé sur les principes de l’équité, de la transparence, et du progrès réalisé plutôt que sur le niveau atteint. Les prix décernés sont collectifs et composés d’équipements destinés à améliorer les conditions de travail de l’équipe de la formation sanitaire dans son ensemble. Toutes les unités de soins participantes gagnent quelque chose en fonction de leur rang dans le classement. Un aspect important dans cette approche comparative est l’autoévaluation des équipes et la rétroinformation qu’elles reçoivent par rapport à leur performance. Pour refléter de façon imagée le progrès des formations sanitaires sur différentes dimensions de la qualité, le projet a développé une « fleur de la qualité », un outil original généré en compilant de nombreux rapports.
Pilier 2 : Les outils du Management de la qualité
Une fois les thématiques du concours choisies au niveau du district sanitaire, l’ensemble de l’équipe de la formation sanitaire, y compris les représentants de la communauté plonge dans le processus d’amélioration de la qualité dans ces domaines par un travail intensif d’autoévaluation – pour faire une analyse lucide de la situation de départ comme base pour un plan d’amélioration impliquant tout le monde. Dans le processus de réflexion et de mise en œuvre de son plan, l’équipe est accompagnée par son coach (un membre de l’Equipe cadre de district) et utilise des outils pratiques et simples pour structurer sa gestion des activités, notamment :
- Le modèle de la Roue de Deming qui donne des repères à l’équipe en divisant le cycle de management de la qualité en quatre étapes (planifier, faire, vérifier, agir)
- Des grilles d’autoévaluation axées sur les indicateurs des thématiques retenues, qui permettent à l’équipe de suivre et renforcer son progrès.
Pilier 3 : Le renforcement des compétences
Le renforcement des compétences concerne aussi bien les équipes des formations sanitaires que leurs encadreurs, membres de l’Equipe cadre de district. En communiquant avec des adultes professionnels il est important d’appliquer les principes de l’andragogie, en respectant l’expérience et les connaissances existantes des interlocuteurs. Pour appuyer la gestion des ressources humaines au niveau district un Guide opérationnel a été développé.
Un grand accent est mis sur la stratégie du coaching par les membres de l’Equipe cadre de district. Le coaching s’est révélé comme une stratégie efficace pour assurer le respect des normes en rapport avec le style participatif préconisé en matière de supervision formative et intégrée. Le rôle du coach est d’orienter et de renforcer les capacités sur place dans les formations sanitaires à travers des visites régulières et en mettant l’accent sur le travail d’équipe. Au cœur du coaching il y a le principe de réflexivité que l’on retrouve dans une supervision formative et intégrée où l’accompagnement ne se substitue pas à la réflexion de l’équipe.
Pilier 4 : La participation communautaire
Dans l’approche intégrée du Management de la qualité, la participation communautaire représente une racine indispensable de la qualité. Une structure de santé existe pour répondre aux besoins de la communauté qui l’entoure. La communication réciproque et la confiance mutuelle sont essentielles pour la bonne marche de cette structure. Au Burundi cette relation vitale avec la communauté est organisée à travers les organes de cogestion que sont les comités de santé (COSA) des formations sanitaires. Le COSA – et à travers lui la communauté – est pleinement intégré dans le processus de management de la qualité. Il y apporte un soutien essentiel, en participant aux autoévaluations des formations sanitaires et à la mise en œuvre de leurs plans d’amélioration (souvent avec des contributions en matériels, argent ou main d’œuvre).
Pilier 5 : L’alignement sur l’existant
Conformément aux grandes orientations des accords internationaux sur l’efficacité de l’aide au développement comme la Déclaration de Paris (2005) ou le Programme d’action d’Accra (2008), l’approche intégrée de Management de la qualité s’insère dans un système de santé existant et vise à en améliorer la qualité et le rendement, en travaillant avec les acteurs sur place. C’est une évidence que l’approche doit s’intégrer dans cette réalité, en s’alignant avec les structures et mécanismes existants, pour avoir un impact et une perspective de pérennisation. Il faut éviter de créer des structures parallèles qui seraient en concurrence avec les structures actuelles, et éviter de promouvoir des standards d’une structure de santé « idéale » – qui n’étant pas réalistes, seraient un facteur de démotivation pour les partenaires.
Pilier 6 : L’innovation digitale – les NTIC
Les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) sont devenues incontournables. Pour appuyer de façon efficiente l’approche intégrée de Management de la qualité, notamment le monitorage de routine et la préparation des rapports de coaching, les coachs membres des Equipes cadres de district ont été outillés de tablettes et d’un logiciel de récolte de données. Ces dispositifs innovants ont été utilisés pour suivre le développement de l’approche ainsi que les changements opérés pour les différentes thématiques du Concours qualité, dont le calcul des notes pour la rétroinformation des structures participantes et l’attribution des prix. Après la fin du Concours qualité – à l’initiative des partenaires du niveau opérationnel – les masques de saisie ont été adaptés aux besoins des districts sanitaires pour refléter le paquet minimum d’activités des formations sanitaires (conformément au principe de l’alignement), et s’intègrent ainsi encore mieux aux dispositifs de monitorage des districts. Enfin, en complément du monitoring, des données d’évaluation ont pu être intégrées à la collecte de routine pour mesurer les effets de l’approche.
Les effets démontrés de l’approche et son coût-efficacité
La boîte à outils conclut avec un résumé des effets démontrés dans le cadre de l’accompagnement scientifique. L’évaluation globale de l’approche révèle un ensemble de preuves convergentes et robustes en faveur de quatre dimensions :
- La compétition positive fait entrer dans le processus mais ce sont les effets qui ont convaincu et ont nourri l’engagement vers des changements profonds et pérennes.
- Le coaching, qui correspond à une supervision formative et intégrée, est efficace pour stimuler la bonne performance des équipes.
- Le travail d’équipe, en s’appuyant sur le collectif, est une source de reconnaissance et de satisfaction au travail. Il permet une plus grande efficacité dans l’amélioration de la qualité.
- La dynamique positive d’amélioration continue de la qualité est soutenable. Dans les six districts sanitaires qui ont expérimenté l’approche, la pérennisation des acquis s’est avérée peu coûteuse et efficace.
Pour lire ou télécharger le rapport d’évaluation complet, cliquez sur cette image.
Mars 2023